• IL Y A VINGT ANS, LES MOINES DE TIBHÉRINE ÉTAIENT ENLEVÉS...

    IL Y A VINGT ANS, LES MOINES DE TIBHÉRINE ÉTAIENT ENLEVÉS...

    Posté par:Pieds Noirs 9A..

    IL Y A VINGT ANS, LES MOINES DE TIBHÉRINE ÉTAIENT ENLEVÉS...

    Moines de Tibhérine : la version officielle d'Alger ébranlée

    Vingt-deux ans après la tragédie, l'enquête portant sur l'assassinat des sept moines de Tibhérine, enlevés dans leur monastère dans la nuit du 26 au 27 mars 1996 avant d'être retrouvés décapités sur le bord d'une route, n'a pas livré ses secrets.
    Tourmentées, les familles n'ont eu de cesse de mettre en doute la thèse officielle, véhiculée par Alger, d'un acte perpétré par le Groupe islamique armé (GIA). De fait, les derniers éléments portés à la connaissance de la justice française ébranlent cette version. Ils émanent d'un rapport scientifique de 185 pages versé en mars dernier à la colossale procédure diligentée par les juges Nathalie Poux et Jean-Marc Herbaut. Les auteurs, tous experts, ont pu travailler à partir de prélèvements effectués sur les têtes des moines à l'automne 2014, exhumées aux abords du monastère des religieux français de l'ordre de Cîteaux, à près de 1000 mètres d'altitude dans la région de Médéa. Dans un premier temps, la mission française s'était vue interdire de ramener les précieux échantillons. Les familles des moines, représentées par Me Patrick Baudouin, avaient alors dénoncé une «confiscation des preuves» par les autorités algériennes. Après des mois de bras de fer, ces analyses ont finalement été transmises. Elles corroborent les doutes émanant d'un premier rapport intermédiaire établi en 2015, à partir de constatations effectuées grâce à des photographies.
    Premier fait troublant, l'observation des insectes - et en particulier de leurs cocons - dans le crâne des religieux a permis aux entomologistes de formuler l'«hypothèse» que «le décès serait antérieur de plusieurs jours à la découverte des têtes». «Cet intervalle post mortem est supérieur à neuf jours», a assuré Me Baudouin au moment de la remise du rapport. A ses yeux, cela pourrait remettre en cause l'authenticité du communiqué attribué au GIA puisque le texte faisait remonter les assassinats au 21 mai 1996 et que les macabres découvertes datent du 30 mai.
    Brouiller les pistes
    Au regard de la décomposition des têtes, les experts vont même jusqu'à conclure que «la piste d'un décès survenu entre le 25 et le 27 avril reste plausible». De quoi créditer davantage les confidences du dénommé Karim Moulaï, ex-agent algérien du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), exilé en Ecosse depuis qu'il a soutenu que les moines avaient été exécutés à la fin avril 1996 par les services secrets de son pays. Par ailleurs, les lésions constatées sur chacune des têtes plaident «en faveur d'une décapitation post mortem». Ce constat, évoqué dès juillet 2015, conforte, sans en apporter la preuve irréfutable, l'idée d'un simulacre d'exécution islamiste pour brouiller les pistes.
    En mentionnant aussi que «l'analyse au microscanner n'a pas révélé de particules métalliques sur les sept prélèvements osseux», le rapport bat en brèche la thèse d'une «bavure» de l'armée algérienne. Le général Buchwalter, attaché de défense à Alger en 1996, avait dit avoir appris qu'un hélicoptère de l'armée algérienne avait ouvert le feu sur un bivouac suspect: «Une fois posés, ils ont découvert qu'ils avaient tiré notamment sur les moines, dont les corps étaient criblés de balles.» Une histoire dans laquelle les cadavres auraient été décapités pour masquer l'énorme ratage de cette opération de ratissage.
    Des témoins jamais entendus
    Enfin, les confrontations génétiques des crânes avec l'ADN de leur famille révèlent que six des sept religieux ont été intervertis dans les cercueils. Une découverte qui atteste, s'il en était besoin, d'une précipitation certaine au moment de mettre les dépouilles en bière. «Pour n'importe quel assassinat, on aurait pris la peine de pratiquer une autopsie», note Me Baudouin.
    Plus que jamais, les familles endeuillées réclament que les investigations se poursuivent. Dans le cadre de la commission rogatoire, les magistrats français ne désespèrent pas de recueillir un jour les confessions d'une vingtaine de témoins encore jamais entendus. Parmi ces personnages clés figurent d'anciens repentis du GIA mais aussi de présumés «geôliers» qui auraient transporté ou séquestré les prisonniers dans une maison surnommée Dar el-Hamra («la Maison rouge»), au lieu-dit de Tala es-Ser dans la région de Médéa. «Nous n'avons pas encore la vérité absolue mais une étape importante a été franchie», a considéré Me Baudouin, convaincu que «ceux qui savent des choses sont encore au pouvoir en Algérie».

    Christophe Cornevin

    Figaro 22.06.2018
    Journaliste 244 abonnés Suivre 
    Rédacteur en chef adjoint, spécialiste sécurité et renseignement


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