• Licenciement abusif au RN ..

    Licenciement abusif au RN : le procès dont Marine Le Pen aurait pu se passer .

    Mauvaise route

     

    Par ..

    Condamné en 2019 pour le licenciement abusif d’un chauffeur, le RN (Rassemblement National) avait fait appel. Hasard du calendrier judiciaire, le procès se tient ce mercredi 16 mars à Versailles, projetant une lumière crue sur la façon dont le parti de Marine Le Pen a traité un de ses employés. Une plongée au cœur de son système, à trois semaines des présidentielles…

     Pas sûr que si c’était à refaire, le RN aurait abattu cette carte. Celle d’avoir fait appel d’un jugement défavorable il y a deux ans et demi. L’affaire se tient ce mercredi à la cour de Versailles où le parti politique de Marine Le Pen va se retrouver dans une position délicate. De quoi perdre, peut-être, quelques plumes au plan politique à trois semaines de la présidentielle… En jeu : refaire le match et annuler le premier jugement des Prud’hommes de Nanterre qui avait condamné le RN en août 2019 à verser la somme rondelette de plus de 80 000 euros à l’un de ses anciens chauffeurs.

    Mais à quel prix ? Puisqu’en revenant sur ce licenciement abusif pour un montant de 20 479,57 euros et de 51 419,20 euros au titre d’heures supplémentaires jamais payées – et encore, les années 2013-2014 n’ont pas été comptabilisées, prescription oblige –, le RN montre là un visage sombre. Bien loin, en tous les cas, de l’image d’un parti proclamant la défense des travailleurs.

    Pour David Parchowski, ex-adhérent du mouvement, la pilule a toujours du mal à passer. Vocabulaire choisi, voix posée, le mot « injuste » revient souvent dans la bouche de ce gaillard de 52 ans. Lui qui a véhiculé des personnalités comme l’émir du Qatar, Muriel Robin ou John Galliano n’en revient toujours pas du manque de respect dont il a fait l’objet. Loyal et serviable durant cinq ans, il lui reste la désagréable sensation d’avoir été pressé jusqu’à plus soif et jeté à la rue « comme un chien ».

    HORAIRES À RALLONGE ET CARBURANT DE SA POCHE

    Embauché en tant que chauffeur en 2013, au salaire de 2 500 euros net par mois, ses horaires dépassaient largement les 35 heures par semaine de son contrat. Un boulot dense consistant à conduire Florian Philippot et Louis Alliot de leur domicile au siège du parti à Nanterre. Sans compter des déplacements sur des plateaux de télévision, les meetings ou les réunions publiques en province. À cela, s’ajoutait la sécurité, avant que celle-ci ne finisse entre les mains de la police à la fin de l’année 2015. Il arrivait parfois qu’un des deux vice-présidents du Front National ne prévienne Parchowski que vers 23 heures qu’il devait prendre son poste à sept heures le lendemain matin. Le chauffeur devait aussi souvent jongler plusieurs fois par jour entre les emplois du temps d’Alliot et Philippot, l’un débutant sa journée à cinq heures du matin quand l’autre la finissait tard dans la nuit…

    Mais ce n’était pas tout. « Lorsqu’il y avait des dépenses, même importantes, à effectuer sur ma voiture de fonction, c’est moi qui réglais tout se souvient Parchowski. Essence incluse. Et cet argent mettait beaucoup de temps à m’être rembourséAgaçant puisque le chauffeur de Marine le Pen, avec un statut similaire au mien disposait, lui, d’une carte de crédit. En plus, lorsque ce dernier était indisponible, c’est moi qui amenais Marine à des dîners ou qui allais chercher ses enfants à la gare Montparnasse pour les ramener chez eux à Saint-Cloud. Le tout sans aucune gratification… »

    VICTIME COLLATÉRALE DU RETRAIT DE PHILIPPOT

    Le 21 septembre 2017, la route de Parchowski avec le FN s’arrête brutalement tandis que Philippot annonce dans les médias son retrait du FN à la suite de dissensions avec Marine Le Pen. Convoqué dans la foulée au siège à la demande de la directrice des ressources humaines, il constate, une fois arrivé, que son badge ne fonctionne plus tandis que la voiture de fonction est aussitôt récupérée par le chef de la sécurité. Dans la foulée, la DRH lui annonce son licenciement. Officiellement, pour cause de chômage technique : avec le départ de l’homme politique, son job n’avait plus de raison d’être. « En fait, je pense plutôt qu’on m’a viré parce qu’on pensait que j’étais complètement acquis à la cause de Philippot, explique Parchowski. Moi, je voulais juste conserver mon emploi. Mais ça, ils n’en avaient rien à faire ! »

    Du jour au lendemain, il se retrouve blacklisté. Sa photo et son nom rejoignent la longue liste des indésirables sur le mur du PC sécurité au siège du FN. « Dans cette affaire, martèle son avocat Charles Morel, le parti de Marine Le Pen, qui s’appelait encore Front national au moment des faits, a fait preuve d’une absence totale de considération pour l’un de ses salariés, corvéable à merci pendant des années avant d’être jeté comme un malpropre. »

    DOUBLE DISCOURS

    Dans cette lutte pour faire reconnaître ses droits, l’homme a pu s’appuyer sur le soutien de Florian Philippot. « Il ne comptait pas ses heures, a attesté le fondateur des Patriotes, et j’ai pu constater la même rigueur vis-à-vis des autres personnalités transportées dans le cadre de son activité professionnelle. » Et d’ajouter : « J’avais de très gros besoins étant constamment en déplacement en région parisienne comme dans le reste de la France. Ces besoins étaient pourvus par Monsieur Pachowski et par un abonnement taxi que le FN avait mis à disposition de plusieurs cadres. »

    Parchowski pointe surtout le double discours du RN. « Avec Marine Le Pen, c’est : faites ce que je dis pas ce que je fais ! Par deux fois, j’ai demandé des augmentations, je n’ai reçu que des réponses négatives… des mois après. Les caisses étaient vides, me répondait-on. Pendant ce temps, j’apprenais en 2017 qu’en plus de son salaire de députée de 7 200 euros, elle s’était rajoutée une augmentation de 2 000 euros aux 3 000 qu’elle touchait déjà mensuellement en tant que patronne du FN. Quand je pense que ce parti prétend défendre les intérêts des travailleurs alors qu’il ne veut même pas payer les heures supplémentaires dues à un de ses salariés. Le pire, ils ont attendu jusqu’à l’ultime jour pour faire appel du jugement des Prud’hommes. Quelle mesquinerie ! »

    Aujourd’hui, l’ex-chauffeur, sûr de son droit, attend ce procès avec sérénité. Il a déménagé en province après la vente de son appartement dont il n’arrivait plus à régler le crédit. Compliqué aussi de retrouver un job. Avoir travaillé au FN « ferme clairement des portes ». Son avenir, il le voit loin de cet ancien métier chronophage. Peut-être dans le tourisme. Avec des horaires fixes, surtout. Son souhait pour les présidentielles ? « Que Marine se plante ! Au bout de la troisième fois, il est temps qu’elle comprenne que les gens ne veulent plus d’elle. »

    Contacté, l’avocat du RN ne nous avait toujours pas rappelé au moment de boucler cet article.


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